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point une destruction, celui qui le commet ne fait que varier les formes, il rend à la nature des élémens, dont la main de cette nature habile se sert aussitôt pour récompenser d’autres êtres ; or, comme les créations ne peuvent être que des jouissances pour celui qui s’y livre, le meurtrier en prépare donc une à la nature, il lui fournit des matériaux qu’elle employe sur-le-champ, et l’action que des sots ont eu la folie de blâmer, ne devient plus qu’un mérite aux yeux de cette agente universelle. C’est notre orgueil qui s’avise d’ériger le meurtre en crime, nous estimant les premières créatures de l’univers nous avons sottement imaginé que toute lésion qu’endurerait cette sublime créature devrait nécessairement être un crime énorme ; nous avons cru que la nature périrait si notre merveilleuse espèce venait à s’anéantir sur ce globe, tandis que l’entière destruction de cette espèce, en rendant à la nature la faculté créatrice qu’elle nous cède, lui redonnerait une énergie que nous lui enlevons en propageant ; mais quelle inconséquence, Eugénie ! Eh quoi ! un souverain