Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/117

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 79 —

tez de la traicte, rendirent leurs fruicts deux fois plus gros qu’à l’ordinaire, dequoy ie m’estonnay, n’en ayant point veu de si gros, ny en France, ny en Canada.

Il y a de belles forests, peuplées de gros Chesnes, Fouteaux, Herables, Cedres, Sapins, Ifs et autres sortes de bois beaucoup plus beaux, sans comparaison, qu’aux autres prouinces de Canada que nous ayons veues : aussi le pays est-il plus chaud et plus beau, et plus grasses et meilleures sont les terres, que plus on aduance tirant au Sud : car du costé du Nord les terres y sont plus pierreuses et sablonneuses, ainsi ||115 que ie vis allant sur la mer douce, pour la pesche du grand poisson.

Il y a plusieurs contrées ou prouinces au pays de nos Hurons qui portent diuers noms, aussi bien que les diuerses prouinces de France : car celle où commandoit le grand Capitaine Atironta, s’appelle Enarhonon, celle d’Entauaque s’appelle Atigagnongueha, et la Nation des Ours, qui est celle où nous demeurions, sous le grand Capitaine Auoindaon, s’appelle Atingyahointan, et en cette estendue de pays, il y a enuiron vingt-cinq tant villes que villages, dont une partie ne sont point clos ny fermez, et les autres sont fortifiez de fortes palissades de bois à triple rang, entrelassez les vns dans les autres, et redoublez par dedans de grandes et grosses escorces, à la hauteur de huict à neuf pieds, et par dessous il y a de grands arbres posez de leur long, sur des fortes et courtes fourchettes des troncs des arbres : puis au dessus de ces palissades il y a des galeries ou guerites, qu’ils appellent Ondaqua, qu’ils garnissent de pierres en