Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/282

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contraire de toutes les autres Nations, qui font plus d’estat des rouges que des autres.

Le matin venu, nous nauigeasmes par le canal enuiron un petit quart de lieuë, puis nous prismes terre, et marchasmes346||par des chemins tres-fascheux et difficiles pres de quatre bonnes lieuës, excepté deux de nos hommes, qui pour se soulager conduirent quelque peu de temps le Canot par vn ruisseau, auquel neantmoins ils se trouuerent souuent embarrassez et fort en peine : soit pour le peu d’eau qu’il y auoit par endroicts, ou pour le bois tombé dedans qui les empeschoit de passer : à la fin ils furent contraincts de quitter ce ruisseau, et d’aller par terre comme nous. Ie portois les avirons du Canot pour ma part du bagage, auec quelqu’autre petit pacquet, auec quoy ie pensay tomber dans vn profond ruisseau en le pensant passer par sus des longues pieces de bois mal asseurées : mais nostre Seigneur m’en garantit : et pour ce que ie ne pouuois suyure mes gens que de loin, à cause qu’ils auoient le pied plus leger que moy, ie m’esgarois souuent seul dans les espaisses forests et par les montagnes et vallées, à faute de sentiers battus : mais à leurs cris et appel ie me remettois à la route, et les allois retrouuer : ce long chemin faict, nous nous rembarquasmes sur un Lac d’enuiron vne lieuë de longueur, puis ayans porté à vn sault assez petit,347||nous trouuasmes vne riuiere qui descendoit du costé de Kebec, et nous y embarquasmes : depuis les Hurons, sortans de la mer douce, nous auions tousiours monté à mont l’eau, iusques au Lac des Epicerinys, et depuis nous eusmes tousiours des riuieres et ruisseaux, la faueur