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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/52

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20mandoit. Or, le calme qui nous arriua apres cette grande tempeste nous seruit fort à propos, pour tirer de la mer vn grand tonneau de tres-bonne huile d’oliue, que nous apperceusmes assez proche de nous, flottant sur les eauës, nous en apperceusmes encore vn autre deux ou trois iours après : mais la mer qui commençoit fort à s’enfler, nous osta le moyen de l’auoir : ces tonneaux, comme il est à coniecturer, pouuoient estre de quelque nauire brizé en mer par ces furieuses tourmentes et tempestes que nous auions souffertes peu de temps auparauant.

Quelques iours après nous rencontrasmes vn petit nauire Anglois, qui disoit venir de la Virginie, et de quelqu’autre contrée, car il auoit quantité de palmes, du petun, de la cochenille et des cuirs, il estoit tout desmaté des coups de vent qu’il auoit souffert, et pour pouuoir s’en retourner au pays d’Angleterre et d’Escosse, d’où la pluspart de son equipage estoit, ils auoient accommodé leur mast de misaine qui seul leur estoit resté, à la place du grand mast qui s’estoit rompu, et les autres aussi. Il pensoit s’esquiuer et fuire ; mais nous allasmes à luy et l’ar- 21|| restasmes, luy demandant, selon la coustume de la mer, à celuy qui est, ou pense estre le plus fort : d’où est le nauire, il respondit d’Angleterre, on luy répliqua : amenez, c’est à dire, abaissez vos voiles, sortez vostre chalouppe, et venez nous faire voir vostre congé, pour en faire l’examen, que si on est trouué sans le congé de qui il appartient, on le faict passer par la loy et commission de celuy qui le prend : mais il est vray qu’en cela, comme en toute autre chose, il se commet souuent de très-grands abus, pour ce que tel