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Page:Saigey - Les Sciences au XVIIIe siècle.djvu/39

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LA PHYSIQUE DE VOLTAIRE.

rail complet de chasse, des armes perfectionnées, un costume de nemrod élégant. Le cheval et la chasse furent bientôt abandonnés, et les journées de Cirey restèrent entièrement consacrées au travail.

Cette existence à la fois calme et remplie a été peinte par madame du Châtelet dans le quatrain suivant, qui resta longtemps gravé au milieu des jardins du château :

Du repos, une douce étude,

Peu de livres, point d’ennuyeux,
Un ami dans la solitude,

Voilà mon sort ; il est heureux.

Comme Émilie n’était point très-portée à faire des vers, il est bien possible que ceux-là, quoique mis sous son nom, ne soient pas de sa fabrique ; elle n’avait pas loin à chercher pour trouver un faiseur de quatrains.

Les étrangers qui ont visité Cirey rendent d’ailleurs le même témoignage. Le président Hénault y est venu en 1744 avant de se rendre à Plombières. Il s’exprime avec enthousiasme dans ses Mémoires sur le bonheur des hôtes u château : « Je les trouvai seuls, dit-il, et un père minime en tiers, grand géomètre et professeur de philosophie à Rome. Si l’on voulait faire un tableau à plaisir d’une retraite délicieuse, l’asile de la paix, de l’union, du calme de l’âme, de l’aménité, des talents, de la réciprocité de l’estime, des attraits de la philosophie, joints aux charmes de la poésie, on aurait peint Cirey. Un bâtiment simple et élégant de rez-de-chaussée, des cabinets remplis de mécanique et d’instruments de chimie, Voltaire commençant, continuant, achevant des ouvrages de tous genres… »

La solitude — cette solitude dont se plaignait tout à l’heure madame Denis — n’était pas telle d’ailleurs qu’on n’eût tou-