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LA PHYSIQUE DE VOLTAIRE.

jugement ; dit-il à Maupertuis. Les commissaires se sont contentés de dire que je n’entendais pas mal la matière. Mais Pitot prétend que le fond de la chose est aussi difficile que la quadrature du cercle. Je ne croyais pas que cette question fût si profonde. »

On se demandera peut-être ce qui portait Voltaire à adresser à l’Académie des sciences un mémoire sur une question de pure mécanique, sur un sujet qui semblait réservé aux géomètres de profession.

Cela peut s’expliquer par un certain désir de toucher à tout et de ne se montrer étranger à aucune branche d’études ; mais nous inclinons à penser que Voltaire avait un motif plus spécial en s’adressant à l’Académie et en cherchant à faire auprès d’elle ses preuves de géomètre. Divers indices nous font supposer qu’à l’époque où nous sommes parvenus il avait conçu secrètement la pensée d’entrer lui-même à l’Académie des sciences.

Il y voyait sans doute un double avantage, une malice à faire et une mesure de précaution à prendre. En 1741, Voltaire n’avait encore aucune attache officielle ; ce n’est que quatre ou cinq ans plus tard que, par la faveur de madame de Pompadour, il fut coup sur coup nommé historiographe du roi, puis gentilhomme de la chambre, et enfin appelé à l’Académie française. Tous ces honneurs lui vinrent, comme il dit, « pour une farce de la foire ; » c’est ainsi qu’il nommait l’opéra-ballet de la Princesse de Navarre[1], qu’il composa à l’occasion du ma-

  1. Cette pièce héroï-comique, qui fut représentée à Versailles avec un grand luxe de décors et une machinerie compliquée, avait été pour Voltaire l’objet d’un long et pénible travail. Il avait dû subir la collaboration du musicien Rameau, homme d’un caractère rude et difficile ; puis la nécessité de