Page:Saint-Amant - Œuvres complètes, Livet, 1855, volume 1.djvu/196

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De cotrets qu’il escroque en ville.
Mais à grand peine ce magot
A-t-il allumé le fagot
Que nous estranglons de fumée ;
Nous toussons d’un bruit importun,
Ainsi qu’une chatte enrhumée,
Et nos yeux prennent du petun.

Encore, ô mon cœur ! mon roignon !
Faut-il, comme un sçavant notaire,
Des beaux meubles du compagnon
Te faire voir quelque inventaire.
Premierement, un vieux panier,
Tiré des fatras d’un grenier.
Est son tabouret et sa chaise ;
Que si, soulageant l’escarpin,
L’un y préside en sire Blaise,
L’autre est tout droit comme un sapin.

Un estuy de luth tout cassé,
Qui traisnoit au coin d’une salle,
Pour tout loyer du temps passé
Luy sert de chevet et de malle ;
Les flegmes jaunes et sechez
Qu’en sa verole il a craschez
Luy servent de tapisserie,
Et semble que les limaçons
Y rehaussent en broderie
Des portraits de toutes façons.

Comme on voit au soir les enfans
Se figurer dedans les nues
Hommes, chasteaux, bois, elefans,
Ainsi nos yeux, dans ces crachats,
Se forgeant à leurs entrechats,