Page:Saint-Amant - Œuvres complètes, Livet, 1855, volume 1.djvu/267

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Où j’ay veu fumer d’aloyaux,
Qui plus valoient que les joyaux
Qui decoroient le pont au Change
Devant ce traistre esclandre estrange,
Qui, plus promptement qu’un esclair,
Luy fit faire le saut en l’air[1].
Adieu le roy des testes-folles,
Grand Erty, qui, dans les escolles
Qu’on tient aux Petites-Maisons,
Fais rire jusques aux tisons.
Las ! de quelle perseverance
Paty ay-je, sous esperance
D’obtenir quelque jour du sort
Ta noble place en cas de mort,
Place que j’eusse demandée,
Et qu’on m’eust sans faute accordée,
Nul n’en pouvant, comme je croy,
La charge mieux faire que moy.
Adieu, palais où la justice
Ne mange que du pain d’espice[2],

  1. Pour comprendre ce passage, il faut se rappeler que ce pont étoit occupé, d’un côté, par 50 forges d’orfèvres, et, de l’autre, par 54 boutiques de changeurs. Il étoit en bois. Souvent emporté par les eaux, incendié aussi en 1621 (24 octobre) et en 1639, il a été rebâti en pierre du 10 septembre 1639 au 20 octobre 1647.
  2. Autrefois les épices étoient fort rares, et si précieuses qu’on les offroit pour étrennes ; plus tard, sous le même nom, on y substitue des sucreries. Gagnoit-il un procès, le plaideur reconnaissant envoyoit des épices à son juge. « Bientôt, lit-on dans les Mœurs et coutumes des Français, par Legrand d’Aussy, l’abus s’en mela, et saint Louis se crut obligé de fixer à la valeur de dix sous les épices qu’il permettoit aux juges de recevoir. » L’avidité des juges se voila davantage, et l’abus continua. La vénalité des charges fit ensuite convertir en argent ces paquets d’épices : de là cette formule, qu’on trouve en marge des