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EPISTRE À L’HYVER

Sur le voyage de Sa Serenissime Majesté en Pologne.



À toy, demon, qui fais que la nature,
Lasse d’agir, est comme en sepulture
Dans un lict froid, où sa fecondité
S’eschauffe et dort sous la sterilité
Qui l’enlaidit pour la rendre plus belle,
Qui sa vigueur irrite et renouvelle,
Et qui luy sert à reproduire au jour
Le gay printemps, les graces et l’amour ;
À toy, vieillard ; à toy, prudent genie
Sous qui l’année, utillement finie,
Reprend son cours et sur qui nos raisons
Fondent l’espoir des trois autres saisons,
Ma plume addrese une juste requeste,
Qu’avec ardeur un humble vent s’appreste
À te porter jusques sur ces climas
Où tu regis l’empire des frimas,
Où, haut monté sur un trosne de gloire
Fait de tes mains, au lieu d’or ou d’yvoire,
De pure neige et de riche cristal,
Tu ranges tout sous ton sceptre fatal.
Le but de grace où ma priere vise
Est qu’il te plaise, ô prince de la bise !
Suspendre un peu l’aspre et dure vertu