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Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/54

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« Aime à trainer au milieu des combats
« Ton peuple doux, et né pour être aimable,
« De tes fureurs n'es-tu point encor las?
« Est-ce trop peu pour ta noire furie
« D'avoir de sang inondé l'Italie?
« Est-ce par-là, monstre, que tu soutien
« Le nom de grand et celui de chrétien?
« Que t'avaient fait ces lointaines contrées,
« Par tes fureurs à la flamme livrées?
« Que t'avaient fait ces enfans, ces vieillards?
« Leur crime donc étoit d'être Lombards!
« Le tien, barbare, est d'être sanguinaire,
« Et pour le ciel de saccager la terre.
« Jeunes Guerriers, sensibles à ma voix,
« Ne courez point à ces lâches exploits;
« Le temps, cette ombre et légère et frivole,
« Trop tôt, hélas ! et nous quitte et s'envole!
« Ces vains lauriers, dont le renom trompeur
« Paye le sang que l'on vend à l'honneur,
« Que valent-ils, après tout, sans la vie?
« Et que sert-il à l'homme qui n'est plus,
« D'avoir été fameux par des vertus?
« Le héros dort sous sa tombe flétrie,
« Et les amours viennent danser dessus!
« Si la fureur tellement vous anime,
« Que tous vos cœurs à ma voix soient fermés,
« Partez, volez, combattez et mourez :
« Mais de vos maux épargnez-moi le crime;
« Et sans troubler et déchirer mon sein,
« Allez mourir par un autre chemin ».
Vous avez vu quelque belle affligée
Entre la crainte et l'espoir partagée,
Mouiller de pleurs ou la gaze ou le lin,
Qui rougit, s'enfle, et s'empreint sur son sein,
Lever au ciel une vue attendrie,
Et proférer avec un air plaintif.
Les noms d'amour, d'honneur, de perfidie.
À ce délire, enfant d'un amour vif,