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Page:Saint-Marc Girardin - Jean-Jacques Rousseau, t. 2, 1875.djvu/342

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JEAN-JACQUES ROUSSEAU.

suadé au roi, dit-il encore dans une de ses lettres à M. de Malesberbes, que cette indigne édition était mon ouvrage et que j’avais du moins connivé à sa publication. Quoique le contraire soit démontré, je suis perdu sans^ressource, car je sais bien que les plaies faites par la calomnie sont incurables ; mais le cri de mon innocence, la seule consolation qui me reste, n’en sera que plus fort. Je vous conjure, monsieur, de prêter à ce cri douloureux votre voix bienfaisante. Certainement on ne vous demandera pas des nouvelles de cette affaire. Quand la caIom-< nie a été aux oreilles des rois, elle se repose dansr leur cœur, et on ne va pointeaux informations, s’il ne se trouve pas une àme, comme la vôtre, courageuse dans sa pitié, qui prenne sur elle le soin généreux de dire et de faire dire au roi combien je suis innocent et calomnié K »

Malesberbes ne se contentait pas de protéger ces doctrines de justice et de liberté qui plaisaient à son âme généreuse ; il les défendait lui-même au besoin, et il n’hésita pas, au nom de la cour ides aides qu’il présidait, à réclamer la liberté d’un obscur colporteur arrêté par les commis des fermes, innocent du délit qu’on lui imputait et jeté dans les cachots de Bicêtre pour étouffer sa plainte. Dans ses remon-* trances, Malesberbes ne plaidait pas seulement la cause d’un innocent, il plaidait pour la liberté individuelle contre les lettres de cachet, et c’est alors qu’il fit entendre ces belles paroles qui sont restées célèbres et qui méritent de n’être jamais oubliées,

. 28 février 1754.