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Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/126

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hui, est aux complications sans fin, aux arabesques, aux modulations incessantes ; mais c’est là une mode et rien de plus. Si les ciselures, les ors et les émaux de la Sainte-Chapelle de Paris ravissent l’œil et la pensée, est-ce une raison pour mépriser les surfaces nues, les lignes sévères et grandioses des temples de l’antique Égypte ? Ces lignes austères ne sont-elles pas aussi suggestives que les courbes multiples et savantes de la délicate merveille du XIIIe siècle ? Il me semble que la fécondité, le beau caractère et la personnalité, ces qualités maîtresses qu’on ne peut refuser à Rubinstein, suffisent a le classer parmi les plus grands musiciens de notre temps et de touts les temps.

Comme presque tous les compositeurs, il rêvait les succès du théâtre, et l’Opéra de Paris l’attirait par-dessus tout. Je vois encore sa joie, quand il m’annonça qu’il avait « une promesse de M. Perrin ». Il ignorait, dans sa loyale franchise, ce qu’en valait l’aune, et il ne m’appartenait pas de l’en instruire. Il alla s’établir dans la banlieue de Paris où il esquissa son Neron qu’il orchestra plus tard à Pétersbourg, et qui fut représenté, traduit en allemand, à Hambourg où cet ouvrage eut une brillante série de représentations. Les Machabées, après un éclatant triomphe à Berlin, échouèrent à Vienne ; le Démon, dont on connaît à Paris les airs de ballet, a eu du succès en Russie, où plaisait surtout le sujet tiré d’un poème de Pouschkine. Féramors (Lalla-Roukh), la plus précieuse, à mon goût, de cette