Aller au contenu

Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/277

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’appelai pour l’arrêter, lui faire mon remerciement, et donner le temps à mon fils de lui venir faire le sien. Cela ne lui déplut pas, et elle nous reçut et nous répondit avec beaucoup de bonté.

Dès qu’elle est rentrée, compliments pêle-mêle, et félicitations d’hommes et de dames, comme on feroit en notre cour. Cela dure quelque temps, puis les dames suivent la reine, d’autres s’en vont chez elles, et les hommes s’écoulent.

Il ne reste plus à la cour d’Espagne trace aucune de cette tolérance de la vanité prétextée de la galanterie espagnole de l’ancien temps, de personne qui s’y couvre sans autre droit que celui de son entretien avec la dame qu’il sert, dont l’amour le transporte au point de ne savoir ce qu’il fait, si le roi ou la reine sont présents, et s’il est couvert ou non. Cette tolérance étoit abolie longtemps avant l’avènement de Philippe V à la couronne d’Espagne. Il n’en reste pas même d’idée. Il n’y a occasion ni prétexte qui laisse couvrir personne que les grands, les cardinaux et les ambassadeurs.

De chez la reine nous allâmes chez le prince des Asturies ; il n’y a là aucune sorte de cérémonie. On l’environne en foule, ni lui ni personne ne se couvre ; mais le nouveau grand, son parrain, le grand ou les grands qu’il a menés le prendre, et ses plus familiers qui font les honneurs de la cérémonie sont les plus près du prince. Cela dure quelques moments. Il s’y trouva et, s’y trouve toujours en ces occasions beaucoup de grands et d’autres seigneurs ; on nous dit que chez la princesse des Asturies cela se seroit passé de même ; mais un érésipèle la retenoit au lit, et on n’y voit ni princesses ni dames. On ne va point chez les infants, et nous n’y fûmes point.

Je ne sais si la conduite que nous fit le duc de Popoli, grand d’Espagne et gouverneur du prince, jusque vers la fin de son appartement, fut un honneur de politesse pour moi au caractère d’ambassadeur, ou une distinction due au