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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/442

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NOTES.


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I. Portraits du roi Philippe V de la reine Louise de Savoie et des principaux seigneurs du conseil de Philippe V, tracés par le duc de Grammont, alors ambassadeur en Espagne[1] .


Pages 5 et suivantes.


« Voici le portrait juste et au naturel du roi d’Espagne, de la reine et de la plupart des grands que j’ai connus à Madrid :

« Le roi d’Espagne a de l’esprit et du bon sens. Il pense toujours juste, et parle de même ; il est de naturel doux et bon, et incapable par lui-même de faire le mal ; mais timide, foible et paresseux à l’excès. Sa faiblesse et sa crainte pour la reine sont à tel point que, bien qu’il soit né vertueux, il manquera sans balancer à sa parole, pour peu qu’il s’aperçoive que ce soit un moyen de lui plaire. Je l’ai éprouvé en plus d’une occasion. Ainsi l’on peut m’en croire, et tabler une fois pour toutes que, tant que le roi d’Espagne aura la reine, ce ne sera qu’un enfant de six ans, et jamais un homme.

« La reine a de l’esprit au-dessus d’une personne de son âge. Elle est fière, superbe, dissimulée, indéchiffrable, hautaine, ne pardonnant jamais. Elle n’aime, à seize ans, ni la musique, ni la comédie, ni la conversation, ni la promenade, ni la chasse, en un mot aucun des amusements d’une personne de son âge ; elle ne veut que maîtriser

  1. Bibl. imp. du Louvre, ms, F, 325, t. XXI, pièce 29. Copie du temps. En lisant ces portraits, tracés par le duc de Grammont, on ne doit pas oublier ce que Saint-Simon dit du caractère de cet ambassadeur et de son peu de succès en Espagne. Cela contribue à expliquer la causticité de Grammont. On trouve d’ailleurs dans ces portraits la confirmation de ce que dit Saint-Simon de son antipathie contre la princesse des Ursins.