Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 4.djvu/310

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devant lui, il tomba en de grandes fautes qui ne trouvèrent pas, comme à Spire, qui les réparât surle- champ. Peu d’heures après l’arrivée de l’électeur dans la plaine d’Hochstedt, il eut nouvelle que les ennemis venoient au-devant de lui, c’està- dire, Marlborough et le prince Eugène, qui joignit son armée avec la sienne, dans la marche de la veille. Rien ne fut mesuré plus juste. Il avoit laissé dixsept bataillons et quelque cavalerie au comte de Nassau-Weilbourg dans les retranchements de Bihel, pour continuer d’y amuser le maréchal de Villeroy tant qu’il pourroit, et se retirer dès que le maréchal désabusé tourneroit sur lui ; le prince Louis de Bade étoit demeuré à son siège d’Ingolstadt. Nos généraux eurent toute la journée à choisir leur champ de bataille et à faire toutes leurs dispositions. Il étoit difficile de réussir plus mal à l’un et à l’autre.

Un ruisseau assez bon et point trop marécageux couloit parallèlement au front de nos trois armées ; une fontaine formoit une large et longue fondrière qui séparoit presque les deux lignes du maréchal de Tallard : situation étrange quand on est maître de choisir son terrain dans une vaste plaine, et qui devint aussi très funeste. Tout à fait à sa droite, mais moins avancé qu’elle, étoit le gros village de Bleinheim, dans lequel, par un aveuglement sans exemple, il mit vingt-six bataillons de son armée avec Clérembault, lieutenant général, et Blansac, maréchal de camp, soutenus de cinq régiments de dragons dans les haies du même village, et d’une brigade de cavalerie derrière ; c’étoit donc une armée entière pour garder ce village et appuyer sa droite, et se dégarnir d’autant. La première bataille d’Hochstedt, gagnée en ce même terrain, étoit un plan bon à suivre, et une leçon présente dont beaucoup d’officiers généraux qui se trouvoient là avoient été témoins ; il paraît qu’on n’y songea pas. Entre deux partis à prendre, ou de border le ruisseau parallèle au front des armées pour en disputer le passage aux ennemis, et celui de les attaquer dans le désordre de leur passage, tous deux