Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/456

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

petit-fils les articles dont elle sera convenue pour la conclusion de la paix. Il est certain que, dès le moment de cette déclaration faite, le roi d’Espagne, persistant dans sa résolution, sera forcé de se mettre entièrement entre les mains de ses ministres espagnols. Ceux-ci ne manqueront pas de demander l’éloignement de votre ambassadeur, ne croyant pas ou ne voulant pas croire qu’il puisse demeurer ici sans avoir part à la confiance du roi leur maître, ce qui leur serviroit de motif et d’excuse pour ne pas s’efforcer de bien servir, et pour dire qu’on feroit échouer leurs desseins par des avis et des insinuations secrètes.

« Il faut cependant, Sire, que Votre Majesté ait, dans tous les cas, un ministre à Madrid. Celui que vous honorez du caractère de votre ambassadeur ne seroit pas ici, dans une pareille conjoncture, aussi agréablement qu’il convient à un représentant du premier ordre. Il ne seroit aussi nullement à propos qu’un homme tout neuf, qui ne connoîtroit pas le terrain, et qui ne trouveroit pas les mêmes accès que ses prédécesseurs, fût choisi pour un emploi de cette nature. Ces deux réflexions me font prendre la liberté de dire à Votre Majesté que personne, à mon sens, ne seroit plus propre à être chargé des ordres de Votre Majesté en Espagne, dans cette conjoncture, que M. de Blécourt, qui a été revêtu de la qualité de votre envoyé extraordinaire pendant quelque temps, sans compter le séjour qu’il a fait avec M. le maréchal d’Harcourt. Je ne connois point M. de Blécourt, mais je sais qu’il a ici la réputation d’un honnête homme, que les Espagnols se sont bien accommodés de lui, et que comme il connoît et le pays et les sujets, il peut servir Votre Majesté plus utilement qu’un autre, sans donner trop d’inquiétude à ceux qui auront le plus de part au gouvernement. Je conçois, du reste, que l’envoi de M. de Blécourt ne seroit que pour un temps, et jusqu’à ce que le changement des affaires et le système de cette cour donnassent lieu à Votre Majesté d’envoyer un ambassadeur. »


IV. MÉMOIRE POUR LE MARQUIS DE BLÉCOURT, ENVOYÉ EXTRAORDINAIRE DU ROI EN ESPAGNE[1].


Page 280.

Le successeur d’Amelot, Blécourt, étant arrivé à Madrid le 23 août 1709, Amelot, avant son départ, rédigea pour lui un mémoire important

  1. Bibl. imp. du Louvre, F 325, 1. XXVI, pièce 74.