Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 8.djvu/404

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d’un seul mot sur les registres du parlement, qu’en vertu d’un arrêt du conseil ou du parlement qui l’ordonne, et d’une note marginale à côté qui exprime la date et l’arrêt qui l’a ordonnée ; et comme il n’y a ni note marginale ni arrêt qui ait ordonné la radiation de ce mot prétendue, il résulte qu’elle est un pur attentat, et que cette radiation est nulle de tout droit.

Ces quinze articles furent donc présentés au roi avec les raisons de leur usage tel qu’il vient d’être expliqué. Il en sentit l’équité et l’importance, et il comprit aussi que le traité d’échange vérifié ne portoit que sur les terres données en échange, sur l’érection d’Albret et de Château-Thierry en duchés-pairies, sur la réservation du simple domaine utile de Bouillon, sur l’abolition des crimes de félonie et autres, mais que le rang de prince étranger accordé aussi et jamais vérifié, ni possible à être présenté au parlement pour l’être, demeuroit toujours en sa main royale à titre de volonté, soit pour l’ôter, soit pour le laisser, quelque arrêt qui pût intervenir dans cette affaire, dont ce rang ne pouvoit être matière. Ainsi, content sur la jalousie de son autorité, il manda Pelletier, premier président, et d’Aguesseau, procureur général, auquel il ordonna de procéder ainsi qu’il vient d’être expliqué.

Ce procureur général, si éclairé, si estimé, de mœurs si graves, se trouva l’ami intime du duc d’Albret, dont la vie et les mœurs répondoient si peu aux siennes, et cette amitié, liée dès leur première jeunesse, s’étoit toujours si bien entretenue depuis, que le duc d’Albret n’avoit d’autre conseil dans ses affaires que d’Aguesseau, et que dans celle de la substitution qu’il eut avec tant d’éclat contre le duc de Bouillon son père, ce fut d’Aguesseau, lors avocat général, qui, à visage découvert, y fit tout, au point que M. de Bouillon, hors d’espérance d’accommodement, n’osa risquer le jugement au parlement de Paris, et fit, par autorité du roi, qui, pour la première fois de sa vie, se voulut bien