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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 9.djvu/287

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des duchesses de Chevreuse et de Beauvilliers, et gendre de Pomponne, pour qui MM. de Chevreuse et de Beauvilliers avoient une confiance entière, et une estime qui alloit à la vénération. D’ailleurs, sans liaison avec Monseigneur, ni avec la cabale frappée. Une telle position sembloit heureuse à l’égard de la nouvelle cour, mais ce n’étoit qu’une écorce. Au fond, Torcy n’étoit qu’en bienséance avec les ducs et les duchesses de Chevreuse et de Beauvilliers ; ni la parenté, ni le commerce continuel et indispensable d’affaires, n’avoient pu fondre les glaces qui s’étoient mises entre eux. Ils ne se voyoient que par nécessité d’affaires ou de bienséance, et cette froide bienséance n’étoit pas même poussée bien loin. Torcy et sa femme vivoient dans la plus parfaite union. Mme de Torcy, avec de l’humeur et de la hauteur, ne daignoit pas voiler assez ses sentiments. Son nom les rendoit encore plus suspects ; et quelque chose de plus que du crédit qu’elle avoit pris sur son mari le rendoit coupable d’après elle, et conséquemment aux yeux des deux ducs dangereux dans le ministère. Il ne fléchissoit point au conseil sur les matières de Rome, où tout en douceur il soutenoit avec force et capacité les avis que le chancelier embrassoit après, et qui donnoient lieu à ses prises avec le duc de Beauvilliers, qui y souffroit beaucoup des raisons détaillées de l’un, soutenues de la force et de l’autorité de l’autre. Mme de Torcy étoit moins aimée que Torcy, et plutôt éloignée qu’approchée de la nouvelle Dauphine pour qui elle ne s’étoit jamais contrainte, encore moins pour qui que ce fût. Elle ne laissoit pas d’avoir des amis, ainsi que Torcy, mais dont pas un n’étoit d’aucune ressource pour le futur que sa sœur par Mme la Duchesse, qui pût leur faire regretter Monseigneur.

Desmarets avoit assez longtemps tâté de la plus profonde disgrâce pour avoir pu faire d’utiles réflexions, et il avoit été ramené sur l’eau avec tant de travail et de peine qu’il devoit avoir appris à connoître les amis de sa personne, et