Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 10.djvu/313

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l’empereur, n’osa l’amuser plus longtemps, et se flatta de faire passer Sala au roi d’Espagne, en déclarant Arias en même temps. Il fit donc avertir le roi qu’il alloit expectorer Polignac avec les autres, et que cela ne se pouvoit plus différer. Il ne restoit plus que des bagatelles à ajuster à Utrecht, et l’espérance de finir alors avec l’empereur étoit perdue : le roi consentit donc à l’expectoration, et dépêcha en même temps un courrier à Polignac, pour le faire revenir sur-le-champ. Il laissa donc ce qui restoit à achever et la paix à signer au maréchal d’Huxelles et à Ménager, et accourut à sa barrette. Le courrier chargé de sa calotte le trouva à mi-chemin. Il la mit dans sa poche et continua son voyage. Il arriva le 22 février à Paris, et le jeudi 23, il alla l’après-midi à Marly chez Torcy, qui, entre la fin de la musique et le souper, le mena chez Mme de Maintenon.

Polignac, qui avoit reçu en passant les compliments et les empressements du salon, présenta au roi sa calotte, qui la lui mit sur la tête, et lui donna une chambre à Marly. Ce fut une chose assez étrange qu’un cardinal in petto de la nomination du roi Jacques traitât et conclût à Utrecht la consommation dernière des malheurs de ce prince et son expulsion de France, avec tout ce qu’il plut aux Anglois de prescrire à cet égard. Sa visite de remercîment à Saint-Germain et de retour dut être bien embarrassante, mais quand on est cardinal rien n’embarrasse plus : au moins ne le put-il être que de la reine d’Angleterre. En conséquence de ce qui avoit été arrêté avec les Anglois, le roi d’Angleterre étoit déjà parti avec une petite suite sous le nom de chevalier de Saint-Georges, pour se retirer à Bar, dont M. de Lorraine avoit fait meubler le château, et l’y vint voir. Il alla aussi à Lunéville voir M. et Mme de Lorraine, et s’arrêta à Bar, à Commercy, chez M. de Vaudémont, et dans tous ces environs assez longtemps.

Le roi, qui n’avoit jamais pu se défaire du respect que le cardinal Mazarin lui avoit imprimé pour les cardinaux, régla