Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/211

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assister à son enterrement. Ce fut aussi le lieu de sa plus chère retraite depuis, toutes les années de sa vie, et longtemps et souvent plus d’une fois l’an, vivant au milieu de ses filles, et d’autres fort proches dont le couvent étoit rempli, dans la plus poignante douleur, et la pénitence la plus austère, sans que rien en parût aux heures du délassement de la communauté. À Paris, dans sa vaste maison, fort loin de ses sœurs (et c’étoit un autre sacrifice, surtout à l’égard de Mme de Chevreuse), elle ne se crut pas obligée à vivre comme les autres veuves, n’ayant ni enfants ni besoins. Sa retraite fut totale ; ni table, ni le plus léger amusement d’aucune espèce. Tout ce qui put y avoir le moindre trait fut banni, tout commerce fut rompu avec le monde. Elle se borna à sa plus étroite famille, et à un nombre le plus court d’amis qui l’étoient de M. de Beauvilliers aussi, avec qui tout lui étoit commun. Sa solitude étoit entière, rarement interrompue par quelqu’un de ce petit nombre. Ses journées n’étoient que prières chez elle ou à l’église, quelquefois chez ses sœurs, et chez Mme de Saint-Simon depuis que nous fûmes à Paris ; nulle autre part, ou comme jamais. Assez l’été dans ses terres pour y faire de bonnes œuvres, où elle étoit, s’il se peut, encore plus seule qu’à Paris. Un trait d’elle que je ne puis me refuser montrera jusqu’où elle porta la vertu.

Les fouille-au-pot de la cuisine d’Henri IV, avant qu’il eût recueilli la couronne de France, furent heureux comme l’a témoigné la fortune de La Varenne et de sa postérité. Deux autres, qui vinrent de Béarn en cette qualité, s’appeloient Joannes et Beziade. Ce dernier seroit bien étonné de voir d’Avaray, son petit-fils, chevalier de l’ordre. Joannes, c’est-à-dire Jean, nom fort commun aux laquais basques, fut mis jardinier à Chambord, devint par les degrés jardinier en chef, ne travaillant plus, et concierge du château. Il s’enrichit pour son état et pour son temps, acheta des terres, fit porter à son fils le nom de celle de Saumery ; et