Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/45

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Roquelaure étoit très mal dans ses affaires, et son père aussi quand il se maria sans quoi que ce soit en dot que son brevet de duc. De ce rien Mme de Roquelaure trouva moyen, à force de procès, de crédit, d’affairés et d’industrie, de parvenir à faire une des plus riches maisons du royaume. La noce se fit à Paris chez Roquelaure avec fort peu d’apparat.

Médavy, n’ayant qu’une fille, la voulut marier à son frère, et obtint pour cela de faire passer sur sa tête son gouvernement de Dunkerque en s’en réservant les appointements. C’est ainsi qu’on escobardoit les survivances depuis que le roi n’en vouloit plus donner que des charges de secrétaire d’État.

Le roi fit en ce même temps une grâce au premier président, sans exemple, et qui ne se pouvoit imaginer à demander que par un panier percé de la dernière impudence, et aussi fortement appuyé qu’il l’étoit. Il avoit un brevet de retenue de cinq cent mille livres. Il osa proposer que le roi lui en payât les intérêts, et il l’obtint tout de suite. C’étoit une vraie pension de vingt-cinq mille livres qu’il eût été moins énorme de lui donner à cru. M. du Maine avoit ses raisons de le prendre par son foible quoique déjà tout à lui, et le roi et Mme de Maintenon les leurs de lui en donner tous les moyens. Le scandale ne laissa pas d’être grand.

Bragelogne, qui avoit été capitaine au régiment des gardes et major général de l’armée d’Allemagne, mais qui ne servoit plus par mauvaise santé, tomba mort chez Le Rebours, à Paris, le jour de la Chandeleur, jouant à l’hombre.

Buys et Goslinga, ambassadeurs d’Hollande, arrivèrent à Paris : le premier pour y demeurer comme ambassadeur ordinaire, l’autre pour s’en retourner au bout de quelques mois de la commission d’ambassadeurs extraordinaires. Ils saluèrent le roi, quelques jours après, dans son cabinet en particulier. Buys, qui portoit la parole, fit un beau discours.