Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 16.djvu/240

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Messine le 9 août, à quatre heures du matin, pendant que l’armée espagnole continuoit de bombarder la citadelle de Messine. Cette flotte, fuyant celle d’Angleterre commandée par l’amiral Bing, faisoit voile vers Catane. Le lendemain 10 août, les vaisseaux Anglois arrivèrent à deux heures après midi dans le Phare, et, le vent manquant à la flotte d’Espagne, ils l’atteignirent à douze lieues de Syracuse, vers le cap Passaro. Les meilleurs vaisseaux espagnols très maltraités, étoient encore poursuivis par Bing le 11 août à midi, et six ou sept navires Anglois, demeurés en arrière pour attaquer l’arrière-garde espagnole, avoient déjà coulé bas quatre navires, cinq autres étoient sautés en l’air à la vue de Syracuse, et l’amiral Bing avoit envoyé dire à Maffeï, vice-roi de l’île, que le reste de la flotte étoit réduit à ne pouvoir ni fuir ni se défendre. La nouvelle de la défaite de la flotte d’Espagne ne causa nulle peine au régent ; au contraire, l’union étoit si bien cimentée entre Son Altesse Royale et le roi d’Angleterre que l’un et l’autre réciproquement se regardoient comme intéressés dans la même cause.

Stairs se réjouissoit de la faiblesse du parti opposé au régent, de l’union du gouvernement, et de penser que Son Altesse Royale ne seroit plus exposée à l’infinité d’inconvénients et de dangers intestins dont elle étoit sans cesse environnée ; enfin que ses amis au dehors pourroient se reposer sur lui et compter sur sa conservation. Peut-être Stairs écrivoit et disoit ce qu’il ne pensoit pas, et souhaitoit, au contraire, de voir le feu de la division embraser tout le royaume ; mais il étoit loin d’avoir cette satisfaction. L’esprit de paix régnoit en France, celui de sédition en étoit banni, et ceux qui connoissoient le bonheur d’y voir la tranquillité maintenue désiroient seulement que Dieu voulût donner à la régence l’esprit de conseil, et de profiter des avantages que la France et l’Espagne trouveroient à bien vivre ensemble dans une parfaite intelligence. C’étoit ainsi que s’expliquoit l’ambassadeur d’Espagne à Paris ; mais secrètement il