Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 16.djvu/279

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Avant les malheurs de Lintz, de Prague, etc., que seroit devenue la reine de Hongrie, réduite à quitter Vienne, si son conseil ou plutôt ses conseils avoient été uniquement composés de quatre ou cinq ministres de l’espèce du nôtre ? Les siens, attachés de père en fils à sa maison par leurs alliances, par leurs terres, par leur état qui se perdoit avec le sien, tous généraux d’armée ou expérimentés en maniement d’affaires, tous en dignités et en considération par leur naissance, se sont surpassés en efforts pour la soutenir, et de la situation la plus désespérée l’ont ramenée à celle où on la voit aujourd’hui par leur science politique et militaire, et par l’autorité de leur naissance, de leurs alliances, de leur crédit dans les provinces héréditaires et dans le reste de l’Allemagne. Je n’irai pas plus loin dans une matière également importante et inutile. Théorie, comparaison, expérience, tout en montre l’importance ; et le pli fatal que la France a pris là-dessus, l’inutilité d’espérer un changement si salutaire. Le fil des choses m’a naturellement emporté à cette digression, et la douleur de la situation présente de la France à n’en pas taire les causes. À mon âge et dans l’état où est ma famille, on peut juger que les vérités que j’explique ne sont mêlées d’aucun intérêt. Je serois bien à plaindre, si c’étoit par regret d’être demeuré oisif depuis la mort de M. le duc d’Orléans. J’ai appris dans les affaires que s’en mêler n’est beau et agréable qu’au dehors, et de plus, si j’y étois resté, à quelles conditions ? et il seroit temps de m’en retirer à présent où je n’aurois plus qu’à envisager le compte que j’aurois à en rendre à celui qui domine le temps et l’éternité, et qu’il demandera bien plus rigoureusement aux grands effectifs et aux puissants de ce monde, qu’à ceux qui se sont mêlés de peu ou de rien.

Avant de prendre sérieusement la suite de ces Mémoires où cette digression l’a interrompue, je ne veux pas oublier une bagatelle, parce qu’elle caractérise M. le duc d’Orléans, et qu’elle m’a échappé et m’échapperoit encore si je ne la