Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 16.djvu/34

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avec La Pérouse à qui il fit dire que l’année précédente, pendant que le roi d’Angleterre étoit en Allemagne, le comte de Schullembourg lui avoit offert, de la part du roi de Sicile, de céder cette île à l’empereur ; que Sunderland, Stanhope, Bernsdorff et l’abbé Dubois étoient également instruits de cette offre. Penterrieder conclut que les mêmes raisons qui l’année précédente engageoient ce prince à cette cession subsistoient encore, et qu’il devoit être également touché des avantages qu’il envisageoit alors et des périls où il s’exposeroit, s’il perdoit l’occasion de regagner l’amitié de l’empereur.

Nonobstant ces insinuations, Penterrieder ménageoit avec soin la confiance des ministres d’Angleterre. Il étoit très content de les voir persuadés que l’union et la vigueur des puissances contractantes étoit le seul moyen de réduire l’Espagne à des sentiments plus modérés, et de l’obliger à se relâcher sur les difficultés qu’elle apportoit encore au traité. Une des principales étoit la prétention du roi d’Espagne de retenir la Sardaigne. Ce prince ayant demandé au régent de lui aider à obtenir cette condition, Dubois dit à Monteléon qu’il en avoit l’ordre exprès de Son Altesse Royale, qu’elle vouloit qu’il fît tous ses efforts pour y réussir, qu’elle en avoit même écrit au roi d’Angleterre, qu’il craignoit cependant que les instances qu’il feroit en exécution de ses ordres ne fussent infructueuses. Monteléon s’étendit en représentations sur l’excès de la puissance de l’empereur. Il les avoit souvent faites aux ministres d’Angleterre, mais ils répondoient seulement qu’ils croyoient favoriser l’Espagne en contribuant à la paix. Monteléon pensoit de même ; il le laissoit entrevoir sans oser l’avouer. C’étoit cependant un grand démérite pour lui en Espagne, et quand il faisoit entendre qu’il seroit très fâché si les médiateurs, perdant toute confiance pour l’Espagne, signoient enfin le traité entre eux, Albéroni faisoit passer cet aveu pour une preuve convaincante que Monteléon étoit gagné par l’Angleterre.