Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1858, octavo, tome 18.djvu/244

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sagesse. Laullez étoit tel en effet, et par les détails de ces compagnies de gardes du corps, il entra dans la familiarité du roi, de la reine sa première femme, de la princesse des Ursins, et bientôt dans leur confiance ; en quoi, pour cette dernière qui lui valut celle des maîtres, sa nation, étrangère à l’Espagne et à la France, lui servit beaucoup ; il fut souvent chargé de commissions secrètes et délicates qu’il exécuta toutes fort heureusement. Il devint ainsi major des gardes du corps et lieutenant général ; c’est en cet état qu’il vint en France, où il reçut le caractère d’ambassadeur au même temps que Maulevrier le reçut à Madrid. Les vues qui m’avoient fait souhaiter d’aller en Espagne me firent aussi désirer liaison avec ces deux envoyés. Louville se trouva en avoir beaucoup avec l’abbé Landi ; et le duc de Lauzun, qui attiroit fort les étrangers chez lui, et qui y voyoit Laullez, me facilita ce que je désirois auprès de lui. La connoissance fut bientôt faite : je voulois plaire au ministre d’Espagne, et lui ne le désiroit pas moins à un serviteur intime de M. le duc d’Orléans ; les choses se passèrent tellement entre nous que l’amitié s’y mit, qui a duré au delà de sa vie. Je reçus de lui mille bons avis et toutes sortes de bons offices et de services en Espagne. Je le retrouvai à mon retour, et encore depuis la mort de M. le duc d’Orléans, et je fis inutilement l’impossible pour lui procurer l’ordre du Saint-Esprit. Enfin il retourna en Espagne avec l’infante, d’où il fut envoyé à Majorque, gouverneur de l’île et capitaine général, où il est mort très longtemps après sans avoir été marié. Il y laissa deux sœurs filles qui y sont demeurées, qui s’adressèrent bien des années après à moi pour être payées d’avances faites par leur frère, et que j’ai servies de tout ce que j’ai pu dans cette affaire par mes amis. Par l’abbé Landi je voulois me concilier la petite cour de Parme qui avoit en beaucoup de choses du crédit sur la reine d’Espagne ; je trouvai un homme poli, assez agréable dans le commerce, qui fut court par mon départ, mais je n’en