Page:Saint-Victor - Tableau historique et pittoresque de Paris, 1827, T4 P1.djvu/18

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Colbert avoit paru le premier : c’est à lui, et nous l’avons déjà dit, que Louis XIV dut ce rétablissement des finances qui le rendit, en peu d’années, maître si tranquille et si absolu de son royaume ; mais il n’est pas inutile d’observer, pour réduire à sa juste valeur ce qui, au premier coup d’œil, pourroit sembler un effort de génie, que cette restauration financière ne fut opérée que par un odieux abus de ce pouvoir qui déjà ne vouloit plus reconnoître de bornes, et qu’une banqueroute fut le moyen expéditif que le contrôleur-général imagina pour arriver au but qu’il vouloit atteindre. Elle fut opérée tout à la fois et sur les engagements de la cour, connus sous le nom de billets d’épargne[1], et sur les

1 Ces billets d’épargne avoient été jetés par la cour dans le commerce, pendant les temps critiques de la régence ; les porteurs en étoient devenus créanciers de l’État ; et les besoins toujours croissants du trésor les avoient fait multiplier d’une manière excessive. Ne voyant aucun moyen de les acquitter, Colbert imagina de les décrier ; et, pour y parvenir sûrement, il commença par les faire refuser dans les recettes du roi. Le moyen étoit sans doute immanquable, et l’effet en fut tel, qu’à peine trouvoit-on cinquante francs sur un billet de dix mille francs. Alors il en fit racheter d’énormes quantités, et paya ainsi à peu de frais des dettes considérables. Quant aux rentes de l’Hôtel-de-Ville, voici ce qui arriva : dans ces mêmes moments de crise, la cour avoit forcé la ville de Paris à emprunter de très grandes sommes à de gros intérêts, et comme elle ne pouvoit subvenir à les payer, une ordonnance obligea les rentiers à imputer au remboursement du capital, ce que l’on déclaroit excessif dans les intérêts qu’ils avoient reçus ; cette opération ruina un