Page:Sainte-Beuve - Causeries du lundi, I, 3e éd, 1857.djvu/297

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simplicité nuit aussi ; ils ne s’en étonnent pas, et ils ont, jusqu’à un certain point, besoin d’être étonnés. Paul-Louis Courier manque son effet, parce qu’il est trop artificiel ; Voltaire manque en partie le sien, parce qu’il est trop simple.

Comme moyen d’action, rien de plus souverain que l’exemple. La vie des hommes célèbres, de ceux qui ont percé et qui sont fils de leurs œuvres, de ces hommes dont Franklin offre le type, serait une des lectures les plus profitables. Dans l’histoire des savants, dans celle des artistes, on trouverait amplement à puiser. On n’oublierait pas, à côté des gens de talent sortis du peuple, ceux qui y sont restés, qui, tout en ayant un génie et un don, n’ont pas cessé de pratiquer un métier. La difficulté, en de tels sujets, est de trouver une biographie déjà faite, écrite avec assez d’intérêt pour être lue de suite sans froideur. On est, dans ce cas, presque toujours obligé de citer le trait saillant et d’abréger le reste, c’est-à-dire qu’on est ramené insensiblement à y mettre du sien comme dans un Cours ; et, une fois les conditions bien posées, je ne vois pas grand mal à cela.

La biographie bien comprise et bien maniée est un instrument sûr pour initier à l’histoire des hommes et des temps, même les plus éloignés de nous. La Vie de Bayard, extraite par M. Souvestre de la chronique originale du xvie siècle, a produit sur les auditeurs une vive émotion et leur a fait admirer l’esprit de la chevalerie dans la personne de son dernier rejeton. Les Vies de Plutarque fourniraient également un moyen de faire connaître de l’antiquité ce qui est indispensable. On dirait à ce peuple de Paris, par exemple : « Il y a eu autrefois un peuple à qui on vous a souvent comparé, mais à qui vous ne ressemblez encore qu’à demi. Les Grecs aimaient l’instruction, ils l’aimaient comme vous, et bien