Aller au contenu

Page:Sainte-Beuve - Le Clou d’or, 1881.djvu/58

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

si ces lieux ne lui étaient pas pires qu’odieux, c’est-à-dire du plus assommant et du plus fastidieux souvenir. Le mal est ailleurs, il est en moi : je ne suis pas fait pour le monde, qu’à la rencontre et au passage ; mais d’habitude, de liaison ordinaire, point. Ceci me reprend et éclate dès que j’ai un moment à voir clair et à respirer. À ce dîner l’autre jour, chez M. de Salvandy, j’étais comme un homme des bois, je regardais la porte ; tous ces gens me semblaient un bal masqué (je n’en ai jamais vu d’autre, et ça me suffit). À aucun moment de ma vie (voyez-vous), je n’ai cessé et je ne cesse de voir la planche sous le tapis, la latte et le galetas sous le plafond doré, le squelette sous tout ce qui le revêt. Qu’y faire ? Ceci m’est inséparable. Quant aux affections, de bonne heure j’ai souffert dans mes plus naturels sentiments, il y a eu dans mon enfance quelque chose qui m’a