Page:Sainte-Beuve - Le Clou d’or, 1921.djvu/40

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d’automne. Voyez-vous, chère, trop chère madame, je m’échapperai à moi-même, si cela dure ; je ne sais pourquoi je vous dis ces choses, moi qui ne voudrais, avant tout, pas du tout vous affliger. Mais cette façon de douceur inaltérable et d’humilité de cœur m’est insupportable par instants. Quoi ! n’y a-t-il pas un autre langage, une étincelle, un accent ? Quoi ! au lieu de dire : « Je suis reconnaissante de tout, de si peu que ce soit », on ne peut pas dire à certain jour : « Oui, je suis exigeante, oui, je ne veux et ne puis rien donner, mais je veux qu’on me donne, j’y consens ; vous en souffrez, et, moi, je vous en remercie. » Oh ! que cette amitié d’une même teinte, voyez-vous, me mènera à mal… C’est triste, chère madame, de si peu s’entendre ; je fuirai un jour loin de