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Page:Sainte-Beuve - Les Cahiers, 1876.djvu/108

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et de feux d’artifice le soir. C’était l’anarchie la plus gaie pour le petit peuple de Paris, qui n’avait plus de police et qui la faisait lui-même. Les gamins couraient les rues avec des drapeaux ; les ouvriers sans ouvrage, et payés pourtant, faisaient une procession continuelle ; les catins avaient jeté leur bonnet, et sur les trottoirs on prenait sans se gêner la taille des plus honnêtes citoyennes : il faut ajouter qu’elles ne s’en fâchaient pas trop. Les grisettes, n’ayant plus de quoi manger, se donnaient pour rien ou presque rien, comme sous la fronde :

ô dieu ! Le bon temps que c’était à Paris durant la famine ! … la plus belle se contentait d’un demi-boisseau de farine. (Bachaumont.)

On chantait à tout bout de champ le chœur des girondins, et l’on se repaissait de discours. Ceux de Lamartine faisaient merveille comme eussent fait ceux d’Ulysse, et il était la sirène du moment. On riait pourtant et l’esprit fran-