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Page:Sainte-Beuve - Notice sur M. Littré, 1863.djvu/10

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notice

langue, ce qui était alors fort rare. Ce père, en un mot, avait le sentiment des hautes études. Il mérita que, dix ans après sa mort, M. Barthélemy Saint-Hilaire, ami de ses fils, et qui avait vécu dans sa maison sous la même discipline, lui dédiât sa Politique d’Aristote (1837), et en des termes qui se gravent et ne s’effacent plus ; voici en partie cette dédicace qui prouve quelle idée, quelle empreinte ce père de M. Littré avait laissée de lui et de sa force d’initiative : « À la mémoire de Michel-François Littré d’Avranches, chef de bureau à la direction générale des Contributions indirectes, mort à Paris le 20 décembre 1827 ; canonnier de marine durant les guerres de notre Révolution ; l’un des collaborateurs du Journal des Hommes libres en 1799 ; patriote sincère et constant, qui a cru et travaillé pendant sa vie entière aux progrès de la liberté ; érudit qui ne devait qu’à lui seul et à la persévérance de ses travaux des connaissances étendues et variées ; philologue distingué, l’un des plus anciens membres de la Société asiatique de Paris ; homme d’une inaltérable droiture, etc. » J’abrége. Voilà l’homme qui a créé et formé celui que nous avons.

Logé au no 3 de la rue des Maçons-Sorbonne, dans une maison qui avait un jardin, il se plaisait à y réunir les camarades de son fils ou de ses fils ; car il avait deux fils, Émile l’aîné, le nôtre, et Barthélemy, le cadet. Mais c’était l’aîné surtout qui portait le cachet paternel, et à qui son père avait transmis toute sa passion de l’étude par le sang à la fois et par l’exemple. Il réunissait donc les jours de congé les premiers de la classe, Burnouf, Hachette, Bascou, mort professeur de littérature fran-