Sauvage, Néolé, laquelle était esclave comme eux de cet Espagnol qui voulait la déshonorer. L’amitié qu’ils se portent les engage à ne rien laisser voir de leur passion à celle qui en est l’objet : elle aime l’un des deux ; elle lui déclare son amour ; il n’a pas la force de lui cacher ses sentiments, mais il court en avertir son rival. « On comprend, dit le président Hénault, enthousiaste « de la pièce, ce que doivent produire les combats de « la maîtresse et des deux amis. » L’amitié demeure la plus forte ; ils veulent se sauver tous trois de la violence de l’Espagnol qui les fait poursuivre, et ils se donnent la mort. On voit cela d’ici : c’était pathétique, déchirant, attendrissant et moral I Peu après avoir fait lire sa pièce au président Hénault, Mme de Boufflers reçut au jour de Tan, pour étrennes mystérieuses, un cachet gravé représentant « l’Amitié tenant l’Amour enchaîné. » C’était une galanterie du président. Jean-Jacques, lui, ne fut pas si aimable ; consulté sur la pièce, il crut y voir de la ressemblance avec une pièce anglaise qu’il avait lue traduite, et il le dit crûment, donnant même à entendre qu’il devait y avoir plagiat. Puis il compare cette maladresse (c’est son mot) à celle que commit Gil Blas en avertissant le vieil archevêque que ses homélies baissaient, et il prête dès lors à Mme de Boufflers un second motif de resisentiment à son égard : « J’avais auprès d’elle, dit-il, des torts que jamais les femmes ni les auteurs ne pardonnent. »
Tout cela était chimérique ; les lettres de Mme de Boufflers, à lui adressées durant ce temps, et tous ses procédés alors et depuis, sont d’une parfaite et gêné-