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Lundi 16 mars 1863.


DUCIS ÉPISTOLAIRE



(suite.)


I.

Je ne voudrais pas qu’on se méprît sur ma pensée, ni qu’on crût le moins du monde que j’exclus l’artiste des vraies, sincères et profondes affections de la vie ; tellement que ce qu’il gagne du côté de la tendresse, il le perd du côté de l’art, et que, pour arrondir le domaine de l’un, il faille nécessairement circonscrire l’autre. Dieu me garde de faire ainsi la part au cœur ! Un jour qu’un lecteur s’étonnait devant un célèbre auteur de romans et de drames, que ceux qui répandent des choses si touchantes dans leurs écrits parussent souvent en mettre si peu dans leur vie : « Qu’y a-t-il d’étonnant à cela ? reprit le spirituel auteur ; nous donnons tout au public, il ne nous reste plus rien pour