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Page:Sainte-Beuve - Nouveaux lundis, tome 2.djvu/159

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Lundi 24 mars 1862.


MONTAIGNE EN VOYAGE.




Il est un petit nombre d’écrivains qui ont un privilège : ils ont peint l’homme dans leurs œuvres, ou plutôt ils sont l’homme, l’humanité même, et comme elle ils deviennent un sujet inépuisable, éternel, d’observations et d’études. Tels sont et seront toujours Molière, La Fontaine, Montaigne. Sur ce dernier, on n’a plus à attendre de découvertes proprement dites ; on en est depuis longtemps aux infiniment petits détails il n’en est aucun pourtant qui soit indifférent, aucun qui n’ait son intérêt, s’il ajoute un seul trait à la physionomie et à l’exacte ressemblance de celui qui a voulu se montrer à nous dans la familiarité la plus intime. « Ce serait plaisir d’avoir un voisin comme lui, » disait Mme de La Fayette. Montaigne est notre voisin à tous on n’en sait jamais trop sur son voisin.

Une double discussion s’est engagée récemment au sujet des inscriptions de la chambre de Montaigne et des épitaphes de son tombeau. Voici de quoi il s’agit. Montaigne, retiré vers l’âge de trente-huit ans dans son