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PORT-ROYAL.

ses Poésies chrétiennes et dans ses traductions en prose. Ses Poésies sont trop souvent ce qu’on peut attendre d’un homme qui faisait huit cents vers en huit jours et en carrosse. Son Poème en stances sur la Vie et la Mort de Jésus-Christ (1634) n’offre qu’une suite de paraphrases faciles, assez harmonieuses et très-monotones, des principales scènes évangéliques. Son Ode sur la Solitude (1642) a plus d’élan et atteint quelquefois à l’expression plus ferme. Il dit en parlant de l’ambitieux :

Son aveuglement déplorable
Lui met la gloire à si haut prix
Qu’il l’achète par le mépris,
Et croit ce mépris honorable :
De la Fortune seule il reconnaît les lois ;
Autant de favoris lui sont autant de Rois,
Lui sont autant de Dieux dont il est idolâtre :
La Cour sert de Dédale à ses égarements,
Et sur cet inconstant théâtre
Il espère ou s’afflige à tous les changements.

Dans les Stances qu’il a composées au nombre de deux cent cinquante-huit sur diverses Vérités chrétiennes, d’Andilly a surtout réussi, et il mérite de garder une place parmi les gnomiques sacrés, à côté de Corneille, traducteur de l’Imitation. Gravons bien ce qui suit dans notre mémoire :

LA CONNOISSANCE INUTILE.

Ceux qui du seul éclat des Vérités chrétiennes
Repaissent leur esprit sans passer plus avant,
Et, quittant la vertu pour embrasser du vent,
Ont les discours chrétiens et les âmes païennes,
Ressemblent à celui qui parmi les clartés
Verroit distinctement les plus rares beautés,
Et rempliroit ses yeux d’une image brillante ;
Mais qui, manquant d’un cœur qui le pût animer,