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PORT-ROYAL

Une autre visite qui ne nous touche pas moins et qui n’était pas moins chère à M. de Saint-Cyran que celle qu’il fit à Port-Royal de Paris, c’est sa visite aux solitaires des Champs. Il connaissait à peine ce monastère des Champs ; il n’y était allé qu’autrefois, voilà déjà bien des années, en visite près de madame Arnauld ; et, depuis l’abandon du lieu, il n’avait pas eu occasion d’y retourner. C’était donc tout ensemble en ce moment comme son premier et son dernier voyage, une apparition nouvelle et suprême au sortir et à la veille d’un tombeau. M. Le Maître surtout l’y appelait ; le saint disciple l’avait vu une seule fois durant sa prison, en mai 1642 ; mais ce n’avait été qu’un rapide embrassement. Ici, ils auront au moins une journée entière d’une intime et spacieuse solitude. Je suppose que ce fut en mars, à quelque premier rayon de printemps, que M. de Saint-Cyran, un peu remis, put faire le petit voyage. Fontaine nous a raconté, dans le plus présent et le plus vivant détail, cette visite et les utiles discours qui la remplirent ; je lui emprunterai, selon ma coutume, abondamment. C’est d’ailleurs le dernier entretien de M. de Saint-Cyran auquel nous assisterons, et cet entretien touche à tout, va au fond de tout, éducation des enfants, littérature sacrée, genre de goût et de talent permis dans Port-Royal : ce sont autant de chapitres essentiels et, pour nous, fertiles à méditer.

« Je ne dis donc rien, écrit Fontaine, de la joie de M. Le Maître, ni de celle des autres solitaires de ce désert : c’étoit

    naire, etc. … Sur ces chemins, je rencontre Hamon, etc. … Ici Nicole, fatigué de disputes, … » Et il continue d’énumérer ; c’est en achevant qu’il dit comme Lancelot, mais en marquant davantage l’effort du pardon : « Les sacrificateurs de Port-Royal léguèrent leur fureur au siècle suivant ; les victimes, en tombant sous le glaive de l’iniquité, léguèrent leur douceur inaltérable. Les hommes qui continuent d’outrager la Vérité et ses défenseurs doivent être l’objet spécial de votre tendresse et de vos prières. »