Page:Sainte-Beuve - Portraits contemporains, t1, 1869.djvu/260

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d’avec les doctrines hérétiques et impies, subordonner le prince au Pape, l’épiscopat à Rome, soutenir en tout et partout l’intervention et la prédominance légitime du pur catholicisme. Si M. Odilon Barrot défend un citoyen qui n’a pas voulu tapisser sa maison un jour de Fête-Dieu, l’abbé de La Mennais accuse l’avocat de prêcher une loi athée. Si un écrivain, dans un livre intitulé Manifestation de l’Esprit de Vérité, s’arme de l’Évangile et du nom de Jésus-Christ contre les riches et les puissants, l’abbé de La Mennais le renvoie à Diderot et à Babeuf, et termine ainsi : « Les passions les plus exaltées se joignant à tant de causes de désordre, personne ne peut dire quels destins Dieu réserve à la société. Les doctrines religieuses, morales et politiques, les lois et les institutions qu’elles avaient consacrées, formaient comme un vaste édifice, demeure commune de la grande famille européenne. On a mis le feu à cet édifice. Les peuples s’entre-regardent à la lueur de l’incendie, et, agités d’un sentiment inconnu, attendent avec anxiété un avenir plus inconnu encore. » Il combat tour à tour et en toute occasion le Globe, les éclectiques, les doctrinaires ; il réfute et malnène les gallicans, M. Frayssinous, l’archevêque de Paris lui-même à qui il cite De Maistre ; il met en groupe tous ceux qu’il appelle les hommes d’entre-deux et qu’il a depuis enjambés. S’il déclare en 1829 une révolution imminente, usant de termes presque prophétiques, ce n’est pas du tout qu’il accuse la tendance jésuitique de la Cour et cette faveur impopulaire accordée au Clergé, c’est au contraire parce que