Page:Sainte-Beuve - Portraits littéraires, t3, nouv. éd.djvu/487

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déjà qu’à Paris M. Coletti, alors ministre résident, M. Piscatory, non ministre encore, mais philhellène de tout temps, M. Eynard, si attaché aux destinées du pays auquel son nom est inséparablement lié, et quelques autres personnes encore s’en entretenaient avec intérêt et comme d’un vœu réalisable. Deux ordres de considérations se présentaient presque à la fois et venaient se combiner entre elles.

On va d’ordinaire étudier la peinture et l’architecture en Italie, c’est bien : la peinture y vit tout entière dans ses chefs-d’œuvre les plus éclatants et les plus accomplis ; l’architecture y règne dans ses plus majestueux développements. Celle-ci pourtant n’est pas là à ce degré de pureté et de simplicité première qui constitue la perfection classique ; cette perfection sans trace d’effort et sans surcharge aucune, il faut la chercher sous le ciel d’Athènes, dans la beauté idéale et légère des temples, dans l’admirable et discret accord des lignes monumentales avec les lignes naturelles du paysage et des horizons. En un mot, si Rome est justement le foyer tout trouvé d’une école de peinture, le centre le plus naturel pour l’architecture est Athènes. Ajoutez que de là on serait mieux à portée d’explorer dans tous les rayons, depuis le fond du Péloponèse jusqu’aux plages d’Ionie, ce sol vierge qui est bien loin, comme celui d’Italie, d’avoir tout rendu.

Quant à la langue, à la philologie, les considérations se pressent, elles concourent au même point, elles viennent en quelque sorte aboutir au même lieu comme à un centre tout désigné de lumière et de perfectionnement. Nous estimons trop l’Université de France, nous avons une trop haute idée des esprits supérieurs, des maîtres illustres qu’elle a produits et qu’elle possède, et de ceux, plus jeunes, qui aspirent à les continuer, pour ne pas exprimer ici ce que nous croyons la vérité : l’Université n’a pas été sans préjugés et sans prévention dans l’étude du grec ancien et à l’égard de la Grèce moderne. Les Grecs modernes y ont bien été de leur faute