Page:Sainte-Marthe - La poésie françoise de Charles de Saincte-Marthe, 1540.pdf/231

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Epistre de Bigotius,
à Saincte Marthe


UN mien Amy, davant qu’avoir enquis
Mon jugement sur rythmes: m'a requis,
Qu’un Epigramme à toy je luy baillasse,
Cuiddant que ce, que je blasme, louasse.
Je blasme fort (sans rien dissimuler)
Voire et du tout je vouldrois annuller,
Si je pouvois, tes vers que fais en rythme:
Veu mesmement, que plus aurois d'estime,
Si te voulois addonner aux Sciences,
Desquelles as du Seigneur, les semences.
Je ne dy pas, que Dames et Seigneurs,
Pour resjouir et recréer leurs Cueurs,
Commettent cas lequel soyt d’eulx indigne,
D’escrire en Vers, quelque matiere insigne:
Aussi à ceulx qui n'ont assés d’esprit,
Pour attenter haultain cas par escript:
Ou bien s'ilz ont leur esprit admirable,
Ilz n’ont esté (par Sort desraisonnable)
En leur Jeuneffe, aux Escholes instruicts:
Concedderay tels Vers, pour leurs deduicts:
Mais les Sçavants trouveroyent fort estrange.
Si un Langey, en un rythmeur se change.

Tu me diras possible, que Dolet,
S’est bien demis à quelque triolet.