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XI
PRÉFACE

lequel on peut formuler des réserves. Mais s’il peut y avoir différence de vues et quelques dissemblances dans la façon de procéder, il n’y a pas et il ne peut y avoir nulle part à formuler des critiques.

Quoi qu’il en soit, et malgré les imperfections inévitables, inaperçues de prime-abord, et que l’expérience acquise modifiera à la deuxième édition, Salles et Montagné ne nous en offrent pas moins un ouvrage attrayant qui sera lu et médité avec profit par les cuisiniers de tout âge et de tout grade. Au titre primitivement adopté « La Cuisine de saison » ils ont substitué, non sans raison mais avec hésitation, celui de La Grande Cuisine qui, à priori, leur semblait présomptueux et sujet à critique. Nul autre, cependant, ne pouvait mieux résumer l’esprit du livre, comme les tendances et les aspirations de ses auteurs ; et ce titre s’identifie absolument avec l’ensemble de l’ouvrage. Et lors même que sifflerait la critique !

Est-il donc un seul ouvrage, un seul auteur qui ait échappé à ce qui est l’inévitable ? Et qu’importe donc la critique à ceux qui, résolument, audacieusement, s’élèvent et planent ; qui veulent laisser une trace de leur passage et l’ineffaçable souvenir de leurs noms !

Dans notre corporation, trop méconnue, on sait toujours rendre justice au mérite, adresser un hommage au courage et s’incliner devant le talent vainqueur ! Dans notre corporation, ceux qui pensent, qui croient et qui créent ou ont créé, ne cherchent pas à réfréner les jeunes ardeurs, à étouffer les sentiments élevés, ni à tuer l’idéal ! Mais ils applaudissent, au contraire, franchement et de grand cœur, à la superbe floraison d’idées nées de la semence jadis jetées par eux dans le terrain trop longtemps inculte où, courageusement, l’Art Culinaire traça les premiers sillons.

Je tiens encore à faire ressortir la profonde déférence dont, en quelques endroits du livre, les auteurs font preuve envers ceux qui les ont précédés, qui, avant eux, ont apporté leur pierre à l’œuvre d’éducation professionnelle commencée par Carême ; et cette anxiété, cette crainte qu’ils manifestent sur l’accueil réservé à leur travail, par le grand public culinaire, ne reposent sur aucun fondement. Ce sont là doutes d’artisans consciencieux et trop modestes.