Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/149

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LETTRE DE CN. POMPEE AU SÉNAT(1O).

L’aa6"9, sons le consulat de C.Cotta et de L.Octa^’ius, le lik’ manqua à Rome et l’on fut obligé d’employer à l’approvisionneniont de la ville l’argent destiné à Métellus chargrdcla guerre d’Espagne. Il parait que Pompée, qui eorninandait aussi une armée en Espagne, ne reçut pas plus de secours (|ue son coll’-Rne Métellus. L’année suivante, il sévit absolument sans ressources, sans vivres et sans argent. Aprésavoir, à plusieurs reprises cl sans succès, prie le sénat de venir à son aide, Pomix’c finit par lui écrire cette lettre dans laquelle il le menace assez clairement de revenir en Italie avec son armée. Cette menace effraya d’aillant plus le peuple que l’on craignait queSertorius ne vint à la suite de Pompée : aussi se hâla-tH)n d’accorder à ce dernier tout ce qu’il avait demandé.

Si c’était on coniijallant contre vous , contre la patrie et les dieux pénates, que je me fusse exposé "a toutes les fatigues, h tous les périls au prix desquels j’ai , dés ma première jeunesse , dis|iersé vos ennemis les plus coupables et assuré votre salul, vous n’auriez pas , pères conscrits, fait pis conlre moi en mon absence, que vous ne faites maintenant ; car, après m’avoir jelé, malgré mon âge (II), au milieu dos dangers d’une si rude fiMorre, vous me condamnez, autant qu’il est en Vous, avec mon armée, qui a si bien méiilédc la patrie, a mourir de la plus cruollc mort, ii nmurir de faim. Est-ce dans cot espoir que le peuple romain a envoyé ses enfants à la guerre ? Esl-ce la la récompense de nos blessures , et de tant de sang versé pour la républiiiuo’ !* Fatigué d’écrire et d’envoyer des messages , j’ai épuisé loutes mes ressources, toutes mes espérances personnelles, tandis que vous, dans un espace de trois ans , vous nous avez donné à peine la subsistance d’une année. Par les dieux immortels ! pensez-vous que je puisse suppléer au trésor, ou entretenir une armée sans vivres et sans argent ?

J’avoue d’ailleurs que je suis parti pour cette guerre avec plus de zèle que de réflexion ; car, sans avoir reçu de vous autre chose que le titre de mon commandement , j’ai su en quarante jours me former une armée ; j’ai , du pied des Alpes , refoulé en Kspagnc l’ennemi déjà maître des délilés qui mènent en Italie ; je me suis ouvert, N travers ces montagnes , une roule différente de celle d’Annibal et plus commode pour nous ; j’ai reconquis la Gaule, les Pyrénées, la Lalétanie, les Indigètos ; j’ai soutenu , avec dos soldais de nouvelle levée et de beaucoup les moins nombreux, le premier choc de Sortorius vainqueur ; et ce n’est pas dans les villes, pour m’attaclior les troupes, c’est dans les camps , cl au milieu d’ennemis acharnés, que j’ai passé l’hiver.

A quoi bon , après cola , énumérer nos combats, nos expéditions d’hiver, les villes que nous avons détruites ou reprises, quand les faits en disent plus que les paroles ? Le camp ennemi enlevé près de Sucron , la i)alaillo livrée près du fleuve Durius ’ , le général ennemi C. Iléronnius battu avec son armée, et Valence emportée, tout cela vous est assez connu ; et, en retour de ces services, ô sénateurs reconnaissants ! vous nous donnez l’indigence et la faim. Ainsi vous traitez do la môme façon mon arméeol colle des ennemis ; vout ne donnez pas plus de solde ’a l’une qu’a l’autre ; et quelque soit le vainqueur, il peut venir en Italie. C’est pourquoi je vous avertis et vous conjure d’y réfléchir, ne me forcez pas, pour ce qui me regarde, "a ne prendre conseil ipie de la nécessité. L’Espagne citérieurc, qui n’est pas occupée par l’ennemi , a été dévastée de fond en comble par nous ’ Aiijourd hui le Douro, fleuve d’Espagne et de Portugal