Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/339

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tent de tout moyen de salut, et ils crurent reconnaître, non l’ouvrage des hommes, mais la volonté des dieux. Vaincus alors par la nécessité, ils se rendirent.

XLIV. César savait sa réputation de clémence trop bien établie, pour craindre qu’un acte de rigueur fût imputé à la cruauté de son caractère ; et comme il sentait que ses efforts n’auraient point de terme si des révoltes de ce genre venaient ainsi à éclater sur plusieurs points, il résolut d’effrayer les autres peuples par un exemple terrible. Il fit donc couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes, et leur laissa la vie, pour mieux témoigner du châtiment réservé aux pervers (13). Drappès, qui, ainsi que je l’ai dit, avait été fait prisonnier par Caninius, soit honte et douleur de sa captivité, soit crainte d’un supplice plus grand, s’abstint de nourriture pendant plusieurs jours, et mourut de faim. Vers le même temps, Luctérios, qui, comme on l’a vu, s’était échappé du combat, était tombé au pouvoir de l’Arverne Epasnactos ; obligé de changer fréquemment de retraite, et sentant qu’il ne pouvait longtemps demeurer dans le même lieu sans danger, il avait dû se confier à beaucoup de gens ; sa conscience lui disait combien il avait mérité l’inimitié de César. L’Arverne Epasnactos, fidèle au peuple Romain, n’hésita pas à le livrer enchaîné à César.

XLV. Cependant Labiénus battait les Trévires dans un combat de cavalerie, et leur tuait beaucoup de monde ainsi qu’aux Germains qui ne refusaient jamais leur secours contre les Romains. Il fit leurs chefs prisonniers, et, parmi eux, l’Héduen Suros, également illustre par son courage et par sa naissance, et le seul des Héduens qui n’eût pas encore déposé les armes.

XLVI. Informé de ce succès, et voyant les affaires en bon état sur tous les points de la Gaule, que ses dernières campagnes avaient domptée et soumise (14), César, qui n’était jamais allé en personne dans l’Aquitaine, et qui n’en avait soumis une partie que par les armes de P. Crassus, s’y rendit avec deux légions, pour y passer le reste de la saison. Cette expédition fut, comme les autres, prompte et heureuse. Car tous les états de l’Aquitaine lui envoyèrent des députés et lui donnèrent des otages. Il partit ensuite pour Narbonne, avec une escorte de cavalerie, et mit l’armée en quartiers d’hiver sous les ordres des lieutenants. Il plaça quatre légions dans la Belgique, avec M. Antonius, C. Trébonius et P. Vatinius ; il en envoya deux chez les Héduens, dont il connaissait le crédit sur toute la Gaule ; il en plaça deux chez les Turons, sur la frontière des Carnutes, pour contenir toutes les contrées qui touchent l’océan ; deux autres chez les Lémovices, non loin des Arvernes, pour ne laisser sans armée aucune partie de la Gaule. Pendant le petit nombre de jours qu’il passa lui-même dans la province, il en parcourut rapidement les assemblées, y prit connaissance des débats publics, distribua des récompenses à ceux qui l’avaient bien servi ; car rien ne lui était plus facile que de discerner de quels sentiments chacun avait été animé envers