Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/423

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fut trouvée par des soldats des troupes auxiliaires, et que l’on appelle "chara", qui, mêlée avec du lait, leur était d’un grand secours. Ils en faisaient une sorte de pain. (2) Cette plante était fort commune. Dans les entretiens qu’ils avaient avec les soldats de Pompée, quand ceux-ci les raillaient sur la disette où nous étions, les nôtres s’amusaient à leur jeter de ces pains pour rabattre leur espoir.

49

(1) Déjà les blés commençaient à mûrir, et l’espoir de se voir bientôt dans l’abondance les consolait de leur détresse. Souvent, dans les veillées et dans les colloques des soldats, on leur entendait dire qu’ils mangeraient plutôt l’écorce des arbres que de laisser échapper Pompée. (2) En outre, ils savaient, par les déserteurs, que les chevaux des ennemis pouvaient à peine se soutenir, et que toutes les bêtes de somme avaient péri ; qu’il régnait dans leur camp des maladies causées par l’étroit espace où ils étaient resserrés, et par la mauvaise odeur qu’exhalaient cette multitude de cadavres ; qu’ils étaient accablés par ces travaux continuels dont ils n’avaient pas l’habitude, et qu’ils souffraient du manque d’eau. (3) En effet, César avait détourné ou comblé toutes les rivières et toutes les sources qui se rendaient à la mer ; et comme le pays était montueux et rempli de vallées étroites, il avait entassé dans ces vallées des monceaux de terre pour servir de digues et contenir les eaux. (4) Aussi, les troupes de Pompée étaient-elles obligées de chercher les lieux bas et marécageux, et de creuser des puits, ce qui était pour elles un surcroît de fatigue. Ajoutez que ces puits étaient fort éloignés de quelques-uns de leurs postes, et que la chaleur les avait bientôt taris. (5) L’armée de César, au contraire, était en bon état de santé, elle avait autant d’eau qu’elle en voulait, et, hormis le blé, des vivres en abondance. Puis, en voyant que la moisson approchait, on attendait un temps meilleur, et on se livrait à l’espérance.

Procédés tactiques

50

(1) Dans ce nouveau genre de guerre, chacun inventait de nouvelles manœuvres. Les soldats de Pompée, s’étant aperçus, à la lueur des feux, que nos soldats passaient la nuit sur les retranchements, s’en approchaient sans bruit, lançaient leurs flèches sur nous, et aussitôt se retiraient. (2) Informés par l’expérience, nos soldats imaginèrent de faire leurs feux dans un endroit, et de se tenir dans un autre {lacune}

Pompée attaque : une série de combats sont livrés le même jour

51

(1) Cependant P.Sylla, à qui César avait laissé le commandement du camp pendant son absence, informé de ce qui se passait, vint avec deux légions au secours de la cohorte ; alors on repoussa aisément les soldats de Pompée. (2) Ils ne purent contenir ni notre vue ni notre choc, et les premiers ayant été renversés, le reste tourna le dos et prit la fuite. (3) Mais Sylla rappela ceux des nôtres qui poursuivaient les fuyards, et leur ordonna de les laisser aller. Bien des gens estiment que s’il eût poussé l’ennemi avec plus de vigueur, il eût pu, ce jour-là, terminer la guerre. Toutefois, on ne saurait blâmer sa conduite ; (4) car, autres sont les devoirs d’un lieutenant et ceux d’un général en chef : l’un doit suivre exactement les ordres qu’il a reçus, l’autre est libre de faire tout ce qu’il juge utile