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Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/435

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après, Pompée arriva en Thessalie, et dans une harangue qu’il adressa à son armée, il lui témoigna sa satisfaction. Il invita les soldats de Scipion à prendre part aux dépouilles et aux récompenses de la victoire. Après avoir réuni toutes les légions dans le même camp, il partagea l’honneur du commandement avec Scipion, voulut qu’on lui élevât un prétoire, et fit sonner la trompette devant sa tente comme devant la sienne propre. (2) Ce renfort et cette jonction de deux grandes armées confirmèrent tous ceux de son parti dans leur confiance, et leur espoir de vaincre s’accrut au point que chaque moment qui s’écoulait leur semblait retarder d’autant leur retour en Italie. Si Pompée faisait quelque chose avec circonspection et prudence, c’était, disait-on, l’affaire d’un jour ; "mais, ajoutait-on, il se plaît à commander, tout fier d’avoir à sa suite des consulaires et des prétoriens." (3) Déjà l’on se disputait hautement les récompenses et les sacerdoces ; on désignait les consuls pour les années suivantes ; quelques-uns demandaient les maisons et les biens de ceux qui avaient suivi le parti de César. (4) Il s’éleva dans le conseil une grande contestation : il s’agissait de savoir si, aux premiers comices qui se tiendraient pour la nomination des préteurs, Lucilius Hirrus, que Pompée avait envoyé chez les Parthes, pourrait, quoique absent, être nommé. Les amis d’Hirrus sollicitaient Pompée d’être fidèle à la parole qu’il lui avait donnée à son départ, et de ne pas tromper la confiance qu’Hirrus avait eue en son crédit ; les autres, qui avaient passé par les mêmes fatigues et les mêmes périls, ne voulaient pas qu’Hirrus seul fût préféré à tous.

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(1) Déjà même on pensait au sacerdoce de César : Domitius, Scipion, Lentulus Spinther, se le disputaient chaque jour avec la plus vive aigreur ; et si Lentulus réclamait les égards dus à son âge, Domitius invoquait sa popularité et sa considération dans Rome, et Scipion faisait valoir la parenté qui l’unissait à Pompée. (2) On vit aussi Acutius Rufus accuser L. Afranius de trahison à cause de ce qui s’était passé en Espagne. (3) D’autre part, L. Domitius dit en plein conseil qu’il fallait, la guerre terminée, remettre à ceux des sénateurs qui avaient pris comme eux le parti de Pompée, trois tablettes pour juger ceux qui étaient restés à Rome ou dans les places soumises à Pompée sans l’aider dans cette guerre ; l’une de ces tablettes servirait pour absoudre ceux qui n’auraient pas encouru de châtiment ; les deux autres pour condamner soit à mort, soit à une amende. (4) En un mot, ils ne parlaient tous que de leurs honneurs futurs, ou de récompenses en argent, ou de leurs vengeances privées ; et, au lieu de s’occuper des moyens de vaincre, ils ne pensaient qu’à la manière dont ils useraient de la victoire.

César tâte l’ennemi et exerce ses troupes

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(1) Après avoir assuré ses vivres et avoir donné à ses soldats le temps de se remettre de la disgrâce de Dyrrachium, César, voyant leur courage suffisamment raffermi, crut devoir éprouver jusqu’à quel point Pompée avait l’intention et la volonté de combattre. (2) En conséquence, il fit sortir du camp son armée, et la rangea en bataille, d’abord à peu de distance de son camp et assez loin de