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Page:Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus - Œuvres complètes, Nisard.djvu/457

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du nombre, aucun n’expose le flanc, aucun ne perd ses rames, mais que tous présentent toujours la proue à l’ennemi. (7) Cependant le reste de la flotte avait suivi. Alors, l’espace étant trop étroit pour s’étendre, il fallut nécessairement renoncer à l’art, et le succès du combat ne dépendit plus que de la valeur. (8) Il n’y eut en ce moment ni habitant d’Alexandrie ni soldat de nos troupes qui songeât ou à l’attaque ou aux travaux de défense ; tous montaient sur les toits et sur les lieux les plus élevés, d’où ils pouvaient apercevoir le théâtre du combat, et chacun, par ses voeux et ses prières, demandait pour les siens la victoire aux dieux immortels.

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(1) Au reste, les chances du combat n’étaient pas égales. Pour nous, une défaite nous enlevait tout asile sur terre et sur mer, et une victoire ne décidait rien : eux, au contraire, vainqueurs ils avaient tout, et vaincus ils pouvaient tenter encore la fortune. (2) C’était d’ailleurs quelque chose de bien sérieux et de bien triste de voir les plus graves intérêts et le salut de tous remis aux mains d’un petit nombre : que l’un d’eux vînt à manquer de constance ou de courage, il compromettait le reste de l’armée, qui n’aurait pu combattre pour elle-même. (3) C’est ce que César, les jours précédents, avait souvent répété à ses soldats, afin qu’ils se conduisissent d’autant plus bravement qu’ils allaient avoir entre leurs mains le salut commun. (4) Chacun en allait dit autant à ses camarades, à ses amis, à ses proches, avant leur départ, les conjurant de ne pas tromper l’attente de ceux qui les avaient choisis pour prendre part à ce combat. (5) Aussi se comportèrent-ils si vaillamment que l’art et l’adresse des ennemis, habitués a la navigation et à la mer, ne leur furent d’aucun secours, que le nombre de leurs vaisseaux, très supérieur a celui des nôtres, ne leur servit de rien, et que l’élite de leurs combattants, choisis sur une si grande multitude, ne put égaler nos troupes en courage. (6) On leur prit dans ce combat une galère à cinq rangs et une à deux rangs, avec tous les soldats et les matelots ; trois furent coulées à fond, sans qu’aucun de nos vaisseaux eût été endommagé. (7) Le reste de leurs navires s’enfuit vers la ville, où, des môles et des édifices qui nous dominaient, on les défendit si bien qu’il nous fut impossible de les atteindre.

Attaque et prise de Pharos par César

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(1) César, voulant empêcher que pareille chose ne se renouvelât, crut devoir mettre tout en oeuvre pour s’emparer de l’île et de la jetée qui y conduisait ; (2) car, les fortifications étant en grande partie achevées, il se flattait qu’il pourrait attaquer en même temps l’île et la ville. (3) Cette résolution prise, il met sur des barques et des chaloupes dix cohortes, l’élite de son infanterie légère, et ceux des cavaliers gaulois qui lui parurent les plus propres à son dessein : puis, pour faire diversion, il fit attaquer par ses galères l’autre côté de l’île, promettant de grandes récompenses à celui qui s’en rendrait maître le premier. (4) D’abord les ennemis soutinrent notre attaque avec un courage égal au nôtre ; ils combattaient à la fois du haut des toits des maisons et de dessus le