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Page:Samain - Œuvres, t1, 1921.djvu/23

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au jardin de l'infante



Des soirs trop lourds de pourpre où sa fierté soupire,
Les portraits de Van Dyck aux beaux doigts longs et purs,
Pâles en velours noir sur l’or vieilli des murs,
En leurs grands airs défunts la font rêver d’empire.

Les vieux mirages d’or ont dissipé son deuil,
Et, dans les visions où son ennui s’échappe,
Soudain — gloire ou soleil — un rayon qui la frappe
Allume en elle tous les rubis de l’orgueil.

Mais d’un sourire triste elle apaise ces fièvres ;
Et, redoutant la foule aux tumultes de fer,
Elle écoute la vie — au loin — comme la mer...
Et le secret se fait plus profond sur ses lèvres.

Rien n’émeut d’un frisson l'eau pâle de ses yeux,
Où s’est assis l’Esprit voilé des Villes mortes ;
Et par les salles, où sans bruit tournent les portes,
Elle va, s’enchantant de mots mystérieux.