Page:Samain - Œuvres, t2, 1921.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
96
ŒUVRES DE ALBERT SAMAIN


 
Tout dort dans les maisons où regarde la lune.
Et ceux-là qu’éreinta la vie et son travail
Jouissent, poings fermés, leur somme de bétail
Ou galopent furieux la course à la Fortune.


Pour moi, je veille, l’âme éparse dans la nuit,
Je veille, cœur tendu vers des lèvres absentes,
Parmi la solitude aux brises caressantes,
Et la lune à travers les arbres me conduit.


Paris est recueilli comme une basilique ;
À peine un roulement de fiacre par moment,
Un chien perdu qui pleure, ou le long sifflement
D’une locomotive — au loin — mélancolique.


Le silence est profond, comme mystérieux.
La nuit porte l’amour endormi sous sa mante
Et je n’entends plus rien dans la cité dormante
Que ton haleine frêle et douce, ô mon amante,


Qui fait trembler mon cœur large ouvert sous les cieux.