Page:Sand - Adriani.djvu/155

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

les premiers jours de leur union, en la voyant étonnée jusqu’à la stupéfaction devant le besoin qu’il éprouvait de la quitter ; mais ce changement d’habitudes le rendait malade. Il devenait bleu quand il n’était pas au grand air, et il n’y en avait pas assez, même dans un jardin, pour nourrir ses vastes poumons. Il lui fallait le vent de la course et le sommet des montagnes.

Le jour où, en le voyant partir aux premiers rayons du soleil, elle lui dit le cœur serré : « Je ne te reverrai donc pas avant la nuit ? » il s’étonna de lui-même, et lui répondit :

— C’est vrai, au fait ! Viens avec moi. Nous ferons une petite chasse tranquille, et nous ne nous quitterons pas.

Pendant une semaine, Laure essaya de le suivre à cheval ; mais elle reconnut bientôt que, même en ne lui imposant pas la chasse tranquille, même en supportant de la fatigue et affrontant des dangers, elle le gênait sans qu’il s’en rendit compte. Le vrai chasseur aime à être seul. Ses plus doux moments sont ceux où il quitte ses compagnons et savoure ses périls, ses découvertes, ses ruses, son obstination, son adresse, sans en partager avec eux l’émotion. Le chasseur le plus positif goûte un charme particulier dans le mystère des bois, dans l’indépendance absolue de ses mouvements, de ses fantaisies, de ses haltes. C’est son art, c’est sa poésie, à lui.

Laure comprit cela et ne le suivit plus. Octave, que