Page:Sand - Adriani.djvu/244

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était d’une certaine Valérie, maîtresse de Descombes.

« Accourez, monsieur Adriani. Il a pris du poison. On l’a secouru malgré lui. Il vit encore, mais pour quelques jours seulement. Je l’ai fait transporter chez moi, où je le tiens caché. Tout est saisi chez lui. Venez, car il a toute sa tête et ne pense qu’à vous. Vous lui procurerez une mort moins affreuse ; car vous êtes grand et généreux, vous, et il n’estime que vous au monde. Venez vite ! on dit qu’il ne passera la semaine. »

Adriani fut si accablé du malheur de son ami, qu’il ne songea pas d’abord au sien propre. Il demanda sur-le-champ des chevaux, et, pendant qu’on attelait, il courut au Temple. Ce fut seulement à moitié de sa course qu’il se rendit compte du désastre qui l’atteignait. Il n’avait rien dit au baron de ces horribles lettres. Personne n’avait pu lui rappeler qu’il devait trois cent mille francs et qu’il ne lui restait rien. Ce fut donc un nouveau coup de foudre qui, ajouté au premier, l’arrêta, comme paralysé, au milieu des vignes.

— Mais je suis déshonoré et mort aussi, moi ! s’écria-t-il. Descombes n’a pas tué que lui-même : il a tué mon amour, mon avenir, ma vie ! Que vais-je devenir ?

Il se laissa tomber sur le revers d’un fossé ombragé et se prit à pleurer son espérance avec un désespoir d’enfant.