Page:Sand - Andre.djvu/148

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Si vous m’aimiez, vous ne demanderiez pas pourquoi je vous aime ; vous le sauriez comme moi, sans pouvoir le dire.

Geneviève garda encore un instant le silence ; ensuite elle lui dit :

— Il faut que je sois franche. Je vous l’avoue : dans les premiers jours vous étiez si ému en entrant ici, et vous paraissiez si affligé quand je vous priais de cesser vos visites, que je me suis presque imaginé une ou deux fois que vous étiez amoureux ; cela me faisait une espèce de chagrin et de peur. Les amours que je connais m’ont toujours paru si malheureux et si coupables que je craignais d’inspirer une passion trop frivole ou trop sérieuse. J’ai voulu vous fuir et me défendre de vos leçons ; mais l’envie d’apprendre a été plus forte que moi, et…

— Quel aveu cruel vous me faites, Geneviève ! C’est à votre amour pour l’étude que je dois le bonheur de vous avoir vue pendant ces deux mois !… Et moi, je n’y étais donc pour rien ?

— Laissez-moi achever, lui dit Geneviève en rougissant ; comment voulez-vous que je réponde à cela ? je vous connaissais si peu… à présent c’est différent. Je regretterais le maître autant que la leçon…

— Autant ? pas davantage ? Ah ! vous n’aimez que la science, Geneviève ; vous avez une intelligence avide, un cœur bien calme…

— Mais non pas froid, lui dit-elle ; je ne mérite